Historiquement c’est en Allemagne et en Belgique que sont nés les styles de bières acides, sûres ou surettes. En Allemagne il s’agit des Berliner Weisse, Gose et Lichtenhainer, en Belgique des Lambic, Gueuze, Faro, Vieille Brune. Les styles de bières acides reviennent à la mode depuis plusieurs années dans le milieu craft beer et les brasseries proposent de plus en plus de bières basées sur ces styles historiques ou dérivés. Nous allons plutôt nous intéresser ici aux styles Allemands cités qui sont vraiment basés sur une phase d'acidification lactique volontaire et non pas soumis à une fermentation spontanée qui peut mélanger plusieurs souches de levures et bactéries.
Dans cette page nous allons démystifier un peu ce qu’est une bière acide, nous allons voir comment utiliser des lactobacilles pour réaliser une acidification naturelle et voir comment on peut réaliser une bière acide du style Berliner Weisse en brassage amateur avec du matériel relativement simple.
Comme chaque brasseur en tout grain le sait, la maische (mash en anglais) est le mélange d’eau chaude et de grain, le moût quant à lui (wort en anglais) est la partie liquide obtenu après la filtration et une fois que l’amidon a été entièrement dissous. L’ensemble des techniques souvent regroupées sous le terme générique de « Sour Mash » consiste donc à introduire des bactéries produisant de l’acide lactique entre la dissolution de l’amidon et avant que la fermentation primaire ne commence.
« L’introduction d’une culture mixte lors de la fermentation des bières sûres est une chose, l’acidification du moût ou de la maiche produit tout autre chose ! »
Un brasseur peut faire un petit Sour Mash pour abaisser le pH de son moût lors du brassage d’une bière ordinaire ou il peut pratiquer un Sour Mash important afin de brasser une bière de type acide.
Utiliser un Sour Mash léger peut permettre d’abaisser le pH du moût et ne doit normalement pas affecter le goût plus que d’ajouter une petite quantité d’acide dans la bière mais en utilisant un Sour Mash plus important vous ajouterez un côté acidulé très net à votre produit fini.
Pour la plupart des bières, le pH à l’empatâge doit se situer entre 5.2 à 5.4. Mesurer le pH du moût est facile et souvent indispensable pour comprendre ce que l’on fait dans l’utilisation de ces méthodes d’acidification. Il suffit d’utiliser un pHmètre portatif numérique ou des bandelettes de test disponibles chez les fournisseurs pour le brassage amateur.
Il existe de nombreuses façons de réduire le pH du moût. La solution la plus simple consistant à ajouter de l’acide lactique, du sulfate de calcium (gypse) ou du chlorure de calcium. Le Sour Mash prend quant à lui un peu plus de temps et d’efforts, mais il présente plein d’autres avantages. Le Sour Mash est une façon traditionnelle de faire baisser le pH et si vous êtes un puriste, il est conforme à la Reinheitsgebot (loi de la pureté sur la bière allemande).
Certains brasseurs estiment qu’il est plus naturel que l’ajout direct d’acide et il va ajouter aussi plus de complexité dans le produit fini mais il faut avant tout l’essayer car c’est une expérience aussi amusante qu’intéressante et une excellente aventure brassicole qui vous fera progresser sur la voie de la connaissance et donc sur tout le reste.
Il y a aussi malheureusement quelques inconvénients. Tout d’abord, cela nécessite plus de temps et d’énergie. Vous aurez besoin d’au moins deux jours pour produire suffisamment de bactéries lactiques afin qu’elles soient correctement utilisées. Mais plus important encore il vous faudra redoubler de vigilance car vous serez en train de produire activement des bactéries potentiellement nuisibles.
Le Sour Mashing est la source de l’acide lactique. L’acide est produit par les bactéries Lactobacillus. Le brasseur les introduit volontairement en ajoutant une souche sélectionnée, directement du malt, un aliment qui en contient ou encore via un starter. Il va leur permettre de se développer dans des conditions optimum de température (plus élevée), de pH, et en l’absence d’oxygène... Ces conditions favorisent la croissance des Lactobacillus tout en inhibant la croissance d’autres organismes indésirables. Comme dans le cas d’une levure « classique », un développement le plus rapide possible évite pas mal de risque. Il faut donc généralement un récipient fermé (pour éviter le contact avec l’oxygène) dont on peut contrôler la température pendant quelques heures/jours. Les Lactobacillus fermentent une petite partie des sucres et produisent de l’acide lactique, contrairement aux Saccharomyces qui produisent de l’alcool.
Sour Beer (bière acide) : on prononce « saoueur » il s’agit d’une bière acide, sûre ou encore surette, souvent acidifiée grâce aux bactéries lactobacillus.
Lactobacillus : Les lactobacilles (nom latin Lactobacillus, souvent appelés «lacto») forment un genre de bactéries à gram positif en forme de tige qui produisent de l'acidité et des arômes aigres sous forme d'acide lactique et de métabolites secondaires trouvés notamment dans les Lambics, Berliner Weisse, Gose et les Gueuze. Toutes les espèces de Lactobacillus sont des aérotolérantes et anaérobie ce qui signifie qu'elles se développent sans oxygène mais peuvent également se développer en présence d'oxygène et même utiliser de l'oxygène dans une certaine mesure. Il en existe des centaines d’espèces, dont beaucoup se trouvent dans l’appareil gastro-intestinal des mamifères ou des insectes. En plus de la bière, certaines espèces de Lactobacillus sont également utilisées pour fermenter le yahourt, le fromage, la choucroute, les cornichons, le vin, le cidre, le kimchi, le cacao et le kéfir. Les Lactobacillus peuvent former une pellicule en surface.
Les Lactobacillus sont des contaminants indésirables dans presque tous les styles de bière, sauf les styles acides évidemment, mais qui ne sont néanmoins jamais pathogènes. Si vous nettoyez et stérilisez votre équipement de brassage toujours avec rigueur vous ne devriez pas rencontrer de problèmes par la suite. Les sources de bactéries lactiques sont assez diversifiées et présentent dans de nombreux ingrédients naturels ce qui en fait une méthode abordable et économique. De plus en plus de laboratoires proposent aussi leurs propres souches de lactobacilles sélectionnés à partir de différentes espèces.
Les espèces homofermentaires : ne produisent qu’un seul produit quand elles fermentent, l’acide lactique.
Les espèces hétérofermentaires : qui produisent de l’acide acétique, de l’éthanol et du dioxyde de carbone en plus de l’acide lactique pendant la fermentation. Elles peuvent aussi produire du diacétyle.
Thermophile : signifie aime la chaleur, les lactobacillus désirés dans les sour mash peuvent survivent à des températures aussi élevées que 55°C et se développent idéalement à des températures comprises entre 35 et 50°C.
Anaérobie : signifie sans oxygène. Les lactobacillus peuvent vivre et se reproduire en l’absence d’oxygène.
Fermentation mixte : désigne une fermentation réalisée avec au moins deux souches de levures et/ou bactéries différentes, en même temps ou bien successivement qui vont apporter des goûts et produits caractéristiques à la bière finale. Par exemple : levures Saccharomyces + Lactobacillus (Berliner Weisse, Gose) / Levures Brettanomyces + Lactobacillus (Lambic)
Brettanomyces : Les plus connues sont Brettanomyces Lambicus et Bruxelliensis qui servent à réaliser le Lambic au travers d’une fermentation spontanée. Ces levures sont capable d’assimiler les sucres complexes contenus dans le moût et de donner un résultat sec, fruité et un coté fermier, d’écurie ou encore « funky » en anglais à l’odeur et au goût. Ces levures ne donnent pas d’acidité, ce sont les lactobacilles qui vont en produire, il arrive que l’on utilise ce genre de levures dans des bières acides pour complexifier la palette aromatique.
Berliner Weisse : Difficile de définir un âge et un lieu précis pour ce style de bière atypique, il existerait depuis plusieurs siècles dans le nord de l’Allemagne. Cette bière légère était populaire du milieu ouvrier au 19ème siècle notamment à Berlin qui comportait des centaines de petites brasseries. Au début du 20ème siècle, la mode consiste à servir cette bière avec des sirops de fruits ou de plantes (framboise, cassis, carvi ou encore d'aspérule odorante). Ce style perd alors en popularité au début du 21ème siècle mais semble depuis quelques années revenir à la mode avec le mouvement craft beer. Les Berliner Weisse sont des bières de blé très claires, rafraichissantes, peu alcoolisées et peu amères présentant une acidité lactique prononcée et une forte carbonatation. Il existe des versions contemporaines aromatisées avec divers fruits, légumes et plantes. La fermentation est une fermentation mixte avec des levures de fermentation haute et différentes souches de Lactobacillus qui apportent l’acidité caractéristique de ce style. Certaines brasseries allemandes introduisaient également des Brettanomyces pour obtenir le profil de saveur qu’ils décrivent comme correct, sans pour autant que celui-ci ne devienne trop puissant.
Gose : Bière originaire du centre de l’Allemagne dont on retrouve des traces d’existance depuis le 15ème siècle, elle tire son nom de la rivière Gose qui traverse la ville de Goslar. Des mines de sel étaient alors en activité dans les environs ce qui avait pour conséquence d’en dissoudre une partie dans les eaux des nappes phréatiques. Ceci avait pour conséquence de modifier le profil minéral de l’eau utilisée pour brasser et offrait donc une touche saline à la bière. La production s’est arrêtée lors de la fin de la seconde guerre mondiale. Cette biere moins amère et plus douce est composée de malts d’orge et de blé, elle bénéficiait également d’une aromatisation avec des graines de coriandre et connaissait une fermentation mixte avec des levures de fermentation haute puis des bactéries lactiques lui donnant ce goût unique acide, salé et épicé.
Lichtenhainer : Originaire de Lichtenhain en Thuringe dans le centre de l'Allemagne. Son apogée se situe vers la fin du 19ème où elle était disponible partout dans les environs, ce style a disparu dans la fin du 20ème siècle. Il s’agit d’une bière de blé fumée, légère et acide. Caractère complexe mais rafraîchissant en raison de la forte atténuation et l'importante carbonatation, avec une faible amertume et une acidité modérée. Au goût on retrouve une saveur fruitée qui peut être sur le citron ou la pomme. Acidité lactique et caractère fumé de force moyenne, une faible amertume, l'acidité en remporte l'équilibre.
Le Sour Mash est un processus dans lequel un empâtage classique est réalisé, mais la maische est ensuite laissée au chaud pendant plusieurs heures après l’inoculation avec des Lactobacillus. Cet ensemencement peut provenir soit d’une culture de souche pure de Lactobacillus, d’un starter de Lactobacillus ou par l’ajout d’une petite proportion de grain de malt de base non broyé, qui posséderont naturellement une ou plusieurs souches sauvages de Lactobacillus sur leurs enveloppes. Après qu’un certain niveau d’acidification soit atteint, la maische est filtrée normalement et on enchaine avec des pratiques classiques d’ébullition et de fermentation.
L’avantage de cette méthode est le fait que les Lactobacillus et les autres bactéries présentes dans le moût seront détruites par l’ébullition et seule une bière ainsi stérilisée ira dans les équipements de fermentation. L’inconvénient de ce procédé est que, sur les trois méthodes présentées, c’est la plus difficile à contrôler et la plus susceptible d’apporter goûts indésirables car il n’est pas possible de faire bouillir et de stériliser la maische avant de faire l’ensemencement.
Pour faire un Sour Mash vous aurez besoin de malt, d’eau, de votre fourquet habituel, d’un thermomètre, d’un récipient ou d’une cuve suffisamment grande. Une glacière ou une cuve isolée seront parfaite pour faire une cuve de Sour Mash. Elle doit être juste assez grande pour contenir la maïsche avec un petit peu d’espace supplémentaire. L. delbruckii est naturellement présent sur le malt si bien qu’une culture ou une souche de lacto n’est pas forcément nécessaire même si la plupart des labos en proposent aujourd’hui.
Faire un Sour Mash est facile. Il faut juste prévoir entre 2 et 4 jours pour effectuer le processus complet de brassage.
Les pratiques suivantes vous aideront cependant à obtenir les meilleurs résultats possibles à partir d’un Sour Mash, mais elles ne sont pas non plus la garantie d’un succès.
Pratiquer un empâtage classique en multi ou mono palier selon la recette suivie.
Après la fin de votre palier de saccharification, réduire le pH de la maïsche à 4.5 en ajoutant de l’acide lactique alimentaire ou de l’acide phosphorique. Vous pouvez aussi éventuellement ajouter du malt acide (ajouté après le palier de saccharification). Le malt acide fait chuter le pH d’une moyenne de 0.06 à 0.1% par % du total du grain. Cela équivaut à rajouter 7 à 10 % du total de la mouture pour un pH habituel de 5.2
Vérifiez votre pH à l’aide d’un pH mètre ou de bandelettes de test et ajuster au besoin avant de continuer.
Assurez-vous d’avoir bien fait un palier de mash-out (inhibition enzymatique) qui atteint la température de 75°C pendant au moins 10 minutes pour assurer l’inactivation des enzymes et un blocage du ratio entre les sucres fermentescibles et non fermentescibles.
Refroidir le moût en dessous de 45°c ou de la température préconisée pour votre espèce de lacto, puis ajouter les Lactobacillus d’une souche pure ou en ajoutant une petite portion de grain de malt non broyé. De ces deux procédés, l’utilisation de souche pure sera susceptible de donner des résultats plus prévisibles et de réduire les risques de contamination par des bactéries productrices de saveurs non désirées.
Eliminer l’oxygène de la cuve d’empâtage en « flashant » le récipient avec une couche de dioxyde de carbone ou d’azote. La cuve d’empâtage doit être scellée le mieux possible pour éviter le contact avec l’oxygène tout au long de la procédure de Sour Mash. Ces gaz inertes peuvent être insufflés directement dans le moût ou ajoutés par le haut au dessus de la couche de liquide car ils sont plus lourds que l’oxygène et le chasserons. Si votre équipement le permet, un mince filet de gaz inerte peut être utilisé pour assurer continuellement un environnement anaérobie au cours de processus de Sour Mash.
Tips : Le siphon à chantilly est un bon moyen de se procurer du CO2 alimentaire avec du matériel de cuisine sinon une bouteille de CO2 alimentaire fera l’affaire.
La température du Sour Mash doit être maintenue le plus possible dans la plage de température optimale pendant tout le processus d’acidification du moût.
Vérifier la progression de votre fermentation au Lactobacillus à l’aide d’un pH-mètre toutes les 3 à 6 heures. Un pH d’environ 3,6 est généralement équivalant à une acidité appropriée pour les styles comme les Berliner Weisse ou les Gose. Un pH d’environ 3,3 sera fortement acide, équivalent à de nombreuses bières de style lambic jeunes. Gardez à l’esprit que pour un pH inférieur à 3,4 ou 3,5, certaines souches de Saccharomyces auront des difficultés à produire une fermentation propre. Dans ce cas, il peut être préférable d’utiliser une fermentation mixte ou 100% Brettanomyces, car cette famille de levure peut rester en bonne santé à des niveaux de pH bas et en dessous de 3.
Après que votre moût ait atteint le pH désiré, augmenter la température de votre maiche à 77°C à 82°C et rincez et filtrez comme à l’accoutumée.
Un pH initial de 4,5 éliminera généralement tout risque d’infection bactérienne pouvant provoquer une intoxication alimentaire mais faite preuve de prudence élémentaire en goûtant le résultat d’un Sour Mash. Seul un pH faible et la présence d’alcool à partir de la fermentation des levures peuvent assurer que votre produit fermenté est sans danger.
Très similaire au processus de Sour Mash, le Sour Kettle permet de produire un moût acide qui peut ensuite être porté directement à ébullition afin de le stériliser avant de le transférer vers votre équipement de fermentation. Par dessous tout, l’acidification dans la cuve d’ébullition permet une plus grande polyvalence et comme processus, il peut être plus facilement contrôlé. Cette méthode vous permet donc de choisir de tuer les Lactobacillus avant la fermentation par les levures ou de permettre de poursuivre leur activité lors de la fermentation de la bière.
Le Sour Kettle commence par l’utilisation d’une procédure de brassage standard et une filtration et un rinçage complet. Si vous voulez tuer les Lactobacillus avant la fermentation, alors il faut effectuer les étapes du Sour Kettle avant l’ébullition. à l’opposé, si vous voulez laisser des Lactobacillus dans votre produit final, l’ébullition sera effectuée avant la procédure de Sour Kettle.
Idem que précédemment sauf que c’est la cuve d’ébullition ou un récipient de stockage intermédiaire du moût qui devra être isolé ou permettre un contrôle optimal de la température. Il doit aussi permettre la purge de l’oxygène.
Du fait du moindre effet tampon du grain et en utilisant un starter approprié cette méthode peut aller relativement plus vite et permettre d’obtenir un pH assez bas en une nuit seulement, permettant ainsi de brasser la veille et de finir le processus d’ébullition et de refroidissement le lendemain.
Si vous choisissez de faire bouillir avant la fermentation afin d’éliminer les Lactobacillus lors de la fermentation, la première étape consistera à ajuster le pH de votre moût à 4,5 en utilisant soit de l’acide lactique de qualité alimentaire ou de l’acide phosphorique. Si vous choisissez de faire bouillir avant acidification afin de conserver des bactéries lactiques dans la phase fermentaire, assurez-vous que votre recette ne comprend pas d’ajouts de houblon ou que ces ajouts ne produiront pas plus de 10 IBU dans la bière finale. Trop d’acide alpha ou d’huiles essentielles en général, vont inhiber les Lactobacillus et empêcher l’acidification par l’intermédiaire de leur fermentation. Après l’ébullition, ajuster le pH à 4,5 comme mentionné précédemment.
Rappel : Il est possible, voir préférable, de faire une mini ébullition de 10 à 15 minutes même en cas d’ébullition ultérieure après la phase d’acidification afin d’éliminer tout risque et partir sur un moût et une cuve stérile.
Refroidir le moût filtré au-dessous de la température de consigne (45°C ou moins) avant introduction dans votre cuve d’ébullition de votre culture des Lactobacillus ou l’ajout d’une poignée de malt de base. Comme pour le Sour Mash, les cultures pures sont plus prévisibles et moins susceptibles de produire une contamination par des bactéries produisant des faux goûts.
Insuffler le maximum de CO2 ou d’azote dans la cuve et la sceller le mieux possible. Purger l’oxygène contenu dans le moût en faisant barboter un gaz inerte à travers pendant quelques minutes. Comme précédemment, si votre équipement le permet, il est possible de laisser barboter lentement ces gaz dans la cuve fermée pendant toute le Kettle Souring pour maintenir un environnement anaérobie.
Maintenir le moût à une température de consigne (entre 35 et 48 °C selon souche et fournisseur) autant que possible. Tout comme le Mash Souring, vérifier le pH de votre moût toutes les 2 à 3 heures.
Lorsque le pH souhaité est atteint, procédez soit à une ébullition normale, ou si vous avez déjà procédé à l’ébullition et souhaitez préserver des Lactobacillus dans votre bière, effectuez le transfert vers les cuves de fermentation en utilisant les pratiques sanitaires appropriées.
Ce troisième procédé permet de laisser les Lactobacillus vivants et actifs lors de la phase de fermentation et dans la bière finale. Dans cette méthode, il est préférable, aussi bien en tant qu’amateur qu’à l’échelle commerciale, d'utiliser des cultures pures sélectionnées et cultivées en laboratoire ou de faire une sélection et une propagation à partir de starters qui se sont révélés sains et sans saveurs suspectes.
Ce faisant et en combinant le Wort Souring avec des pratiques exemplaires discutées plus tôt, cela vous assurera au moins en partie que votre bière reste exempte de micro-organismes indésirables avec leur lot de saveurs et d’odeurs étranges. Pour les brasseries commerciales qui ne peuvent pas chauffer leurs fermenteurs, ce processus est identique à un Kettle Souring après l’ébullition finale sauf que les lactobacillus seront introduit dans le fermenteur. Lors de la création de recettes pour des bières acides, le niveau d'acide alpha des ajouts de houblon doit être maintenu au dessous de 10 IBU pour prévenir l'inhibition des Lactobacillus.
Empâtez et faites bouillir votre moût comme à l’acoutumée. Pendant l'ébullition, ajuster le pH à 4,5 en utilisant de l'acide lactique ou phosphorique de qualité alimentaire.
Refroidir le moût au-dessous de 45°C et transférez dans un fermenteur adapté et parfaitement désinfecté. Pratiquez un transfert sans oxygénation et autant que possible stérile. Il est préférable pour ces transfert et pour la fermentation qui va suivre d'utiliser des fermenteurs en acier inoxydable même si des dames jeannes en verre peuvent résister à ces températures (l’idéal étant les Soda Keg ou des fermenteurs en inox parfaitement étanches).
Purgez à la fois le moût et le fermenteur avec du dioxyde de carbone en utilisant soit la ligne de sortie pour un Soda Keg ou une pierre frittée pour les autres types de fermenteurs.
Ensemencez avec une culture pure de Lactobacillus ou un starter de Lactobacillus qui est exempt de défauts perceptibles.
Maintenir le moût à une température comprise entre 44 et 48 °C autant que possible (ou selon les températures recommandées par votre fournisseur dans le cas d’utilisation de souche de laboratoire). Cela peut être réalisé à l'échelle amateur en utilisant un élément chauffant (tapis chauffant de terrarium par exemple) ou un autre élément de chauffage dans une chambre isolée telle qu'un petit réfrigérateur.
Comme dans les méthodes précédentes, vérifier le pH toutes les 2 à 3 heures.
Lorsque le pH désiré est atteint, refroidir le moût jusqu'à la température appropriée d’ensemencement et de fermentation (entre 12 et 15°C pour des Saccharomyces de fermentation basse ou entre 18 et 22°C pour des Saccharomyces de fermentation haute ou des Brettanomyces).
L'oxygénation est à ce stade bénéfique pour la levure et ne nuira plus au développement de faux goût de la part des Lactobacillus. Ensemencez avec une ou plusieurs souches de Saccharomyces ou de Brettanomyces et procédez à une fermentation alcoolique standard à partir de ce point.
Il est important de rappeler qu’une bière aux Lactobacillus ne doit pas présenter des arômes ressemblant à du vomis, de la bile, du parmesan, des pieds qui puent ou des excréments. La présence de l'un de ces arômes avant l'ajout de Saccharomyces ou de Brettanomyces est une indication d'infection par une espèce indésirable de bactéries telles que Clostridium Butyricum.
De plus, des arômes ou des arômes médicinaux, plastiques, fumigènes ou phénoliques sont indésirables et sont une indication d'infection par une souche de levure sauvage.
Il est normal que le moût acidifié puisse avoir une odeur sucrée, de pain, pâteuse, un peu rance, beurrée, végétale ou qui rappelle la choucroute ou le yaourth. Ces arômes sont dus aux sous-produits de la fermentation hétérofermentative par Lactobacillus tels que le diacétyle et l'acétaldéhyde. Certains des arômes typiques de pain et de rance peuvent persister dans la bière finale, mais tous les arômes potentiels de sucré, de légumes, de beurre et de choucroute aurront en général disparus après la fermentation par Saccharomyces ou Brettanomyces.
Un grand MERCI à Christophe de la brasserie La Montagnarde pour m’avoir permis de reprendre du contenu de son document sur les bières acides.
Pour aller plus loin sur le sujet :
Voici le matériel supplémentaire nécessaire pour la réalisation de bières acides :
Un pHmètre Adwa modèle ad12 (servovendi) : 30€ ou bandelettes papier pH
Un controleur de température Inkbird ITC 310-B (amazon) : 45€
Un tapis chauffage pour reptiles 46W 87x27cm (zoomalia) : 25€
Un détendeur C02 pour sparklettes (aliexpress) : 20€
Cartouches CO2 ou azote alimentaire type chantilly ou bien bonbonne de CO2
Couverture de survie et un duvet pour isoler le tout
On peut remplacer le controleur de température et le tapis chauffant par une cuve chauffante et thermorégulée (type Grainfather) entre 35 et 50°C, le pHmètre par des bandelettes de papier pH et le système CO2 par un siphon à chantilly avec des cartouches d’azone ou de CO2
Une source de lactobacilles (idéalement un paquet de lactos provenant d'un laboratoire, exemple White Labs WLP677). Sur les photos cultures réalisées par Christophe le Coyote.
Les ingrédients de la recette de Berliner Weisse cliquez ici pour voir ma base de recette
Faire une base maltée d’environ : 45% froment, 45% pils , 10% malt acide
Traitement d’eau si nécessaire
Brassage classique monopalier 66-68°C viser un pH 5,2 / 5,3
Filtrer et rincer de manière classique
Faire une petite ébullition de 15 min pour chasser l’oxygène et stériliser le moût
Refroidissement à 37°C dans la casserole (ne pas dépasser 40°C pour ne pas tuer les lactos) et ne pas oxygéner
Mesurer le pH. Je suis généralement aux alentours de pH 5 avec cette base, je ne réacidifie pas.
Eventuellement re-acidifier avec de l'acide lactique alimentaire si nécessaire pour être en dessous de pH 4,5
Ajouter les lactos dans la casserole
Recouvrir le moût avec du film étirable pour limiter le contact en surface. Mettre la sonde (désinfectée) du controleur de température dans la cuve.
A l’aide d’un tuyau désinfecté, purger directement dans le moût au C02 pour chasser l’oxygène et éviter l’oxydation et le développement de faux-goût
Bien fermer la casserole avec le couvercle, scotcher le tapis de terrarium autour de la casserole, recouvrir avec la couverture de survie et le duvet.
Maintenir à 37°C pendant quelques jours (descente entre 24 et 72h), en pratique dans mon cas j’ai souvent constaté que la descente du pH était assez linéaire et se faisait en 48h. Il vaut mieux contrôler le pH environ toutes les 6h et plus régulièrement à l'approche du pH cible. Un pH de 3,6 correspond au style Berliner Weisse pas trop acide, Pour une bière un peu plus acide le pH peut descendre vers 3,4 voire jusqu'à 3,3. Eviter de descendre trop bas (pH < 3,3) sinon la fermentation aura du mal à se faire par la suite avec une levure Sacchamomyces peu habituée à l’acidité.
Quand le pH cible est atteint refaire bouillir le moût environ 15 minutes et effectuer un houblonnage aromatique, amertume selon les goûts (max 15-20 IBU sur ce style de bière)
Eventuellement mettre des nutriments à levure pour favoriser son développement
Ne pas mettre d’irish moss pour conserver un coté trouble
Une fois le moût refroidi ajouter une bonne dose de levure, idéalement préparer un starter pour qu’elle soit vigoureuse, pH de 4 pour l’habituer à l’acidité. Sinon prévoir une double dose de levure par rapport à un brassin habituel. Levure US-05 ou levure lager pour un résultat clean et neutre, levure type blanche pour berliner weisse classique avec quelques esters épicés.
Pour les fruits dosage courant 100g à 200g de fruits / L ajout pendant la fermentation ou bien pendant la dernière ébullition si besoin de les stériliser. Quelques exemples d'aromatisation dans cette page (activer les informations photos dans la galerie photo pour voir les commentaires).