Il est intéressant d'utiliser des malts ou des céréales non maltées qui ont subi une torréfaction pour apporter des saveurs supplémentaires et de la couleur à la bière. C'est notamment le cas dans certains styles de bières comme les Stout, Porter, mais aussi les Schwarzbier, Dunkelweissen, Black IPA... Nous allons voir 3 techniques différentes pour utiliser au mieux les grains torréfiés et obtenir un rendu adapté au style de bière à réaliser.
C'est la technique de base qui consiste à concasser les grains torréfiés avec le reste des malts, ils subiront alors le processus de brassage en entier. Avec les températures élevées et la durée d’infusion les grains torréfiés libèreront leur couleur et leurs arômes mais aussi de l’acidité et de l’âcreté liée aux tanins contenus notamment dans leur enveloppe. Cette technique fonctionne si la proportion de grains torréfiés dans la base maltée n’est pas très importante et si l’on veut obtenir un caractère torréfié important comme dans les Stouts et Porters par exemple. Elle est à éviter si l'on veut garder un caractère torréfié plus discret dans la bière et limiter l'âcreté.
La technique intermédiaire dans laquelle on réalise l’empâtage avec les grains clairs, on concasse les grains torréfiés séparément et on les ajoute à la maische en toute fin de brassage ou bien lors de la filtration. Cette durée plus limitée d’infusion à haute température va réduire la diffusion de tanins et offrira un résultat moins âcre, la diffusion du goût et de la couleur sera également un peu plus limitée. Cela dépendra aussi de la manière de recirculer le moût et de rinçer les drêches ainsi que de la durée de cette opération. Cette technique est intéressante pour limiter le côté acide et âcre du torréfié sur la bière et apporter de la couleur, comme sur les Dunkelweissen et les Schwarzbier par exemple.
On peut leur faire subir un tel traitement parce que les grains grillés ne contiennent pas d’enzymes diastasiques normalement utiles lors du brassage et que l’amidon qui les compose aura également été détruit dans le processus de torréfaction (et évitera d’obtenir une bière trouble). Ces grains n’ont donc techniquement pas besoin d’etre ajoutés à l’empâtage.
Le Cold Steeping littéralement « trempe à froid » consiste à faire macérer des grains de malts ou céréales torréfiées concassés finement ou moulus dans de l’eau à température ambiante afin d’en dégager les arômes de grillé et la couleur issus de la torréfaction mais d’en limiter l’extraction des tanins qui donnent un résultat acide et âcre. On obtient ensuite un jus noir et très doux qui peut être intégré dans le moût à divers moments après l’étape de brassage.
Cette technique se prête particulièrement bien aux malts et aux céréales qui ont subi une torréfaction, l’intérêt étant d’extraire les goûts et les saveurs issus de la torréfaction tout en limitant le rendu acide et âcre. Voici une liste non exhaustive de malts et grains intéressants à utiliser en cold steeping : Chocolate Malt, Black Malt, Carafa, Roasted Barley, Chocolate Wheat, Chocolate Rye.
On peut leur faire subir un tel traitement parce que ces grains ne contiennent pas d’enzymes diastasiques normalement utiles lors du brassage et que l’amidon qui les compose aura également été détruit dans le processus de torréfaction (et évitera d’obtenir une bière trouble). Ces grains n’ont donc techniquement pas besoin d’etre ajoutés à l’empâtage.
La trempe à froid est idéale pour réaliser des styles de bières dont le caractère torréfié doit plutôt être en faveur de la douceur comme les Schwarzbier ou les Black IPA ou bien encore foncer la couleur d'une bière. Cette technique peut également s’utiliser sur une partie des grains torréfiés en complément de la première ou seconde technique sur la seconde partie des grains par exemple. C’est ce que je fais notamment sur les styles Imperial Stout et Baltic Porter pour limiter l’impact acide et âcre du torréfié sur le résultat final et obtenir un peu plus de douceur et mettre en avant le goût chocolaté et café.
Concasser finement les grains torréfiés, il est même conseillé de les moudre pour optimiser la libération du goût et de la couleur, d’autant plus si vous souhaitez utiliser par la suite uniquement la partie liquide. Mélanger cette mouture avec 4 à 5 fois son poids en eau à température ambiante. Retrancher cette quantité d’eau à la quantité d’eau de rinçage nécessaire.
Laisser macérer le tout pendant plusieurs heures (personnellement je prépare cette trempe la veille du brassin), certaines sources parlent même de 24h de trempe. La diffusion des arômes issus du grain dans l’eau froide étant beaucoup plus longue que dans l’eau chaude, il vaut mieux tout de même prévoir un peu de temps (minimum 6h).
Si vous prévoyez d’utiliser la partie liquide uniquement, filtrez avec un tamis et conservez la partie liquide.
Sinon conserver le tout tel quel en attendant l'utilisation.
Il n’y a pas de méthode unique, certains utilisent la totalité du cold steeping (jus + grains moulus) et d’autres juste la partie liquide, cela va aussi dépendre de quand on décide d’ajouter cette trempe. Il est même possible de mettre la partie solide à la filtration et la partie liquide plus tard à l’ébulition. Bref il faut tester pour choisir la méthode adaptée à ce que l’on veut faire.
Le Cold Steeping entier (jus + grains moulus) s’ajoutera de préférence lors de la filtration afin de pouvoir filtrer la partie solide et de bénéficier d’une extraction maximale des saveurs grâce à la recirculation du moût et au rinçage des drêches. On obtiendra un résultat doux, subtil et un peu plus corsé et plus foncé que la version avec le jus uniquement. Je conseille cette version pour les styles Stout et Porter.
La version liquide filtrée du Cold Steeping s’ajoutera plutôt avant, pendant ou en fin d’ébullition du moût pour obtenir un caractère torréfié très doux et subtil. Plus on l’ajoutera tard et plus on limitera l’extraction des tanins. Je conseille cette version pour les styles Schwarzbier et Black IPA ou encore pour foncer une bière qui ne doit pas avoir un caractère torréfié trop prononcé.