Obtenir une bière limpide

La recherche d’une bière claire et limpide est le but de beaucoup de brasseurs professionnels comme amateurs. Bien que depuis quelques temps et sur certains styles de bières le trouble (haze en anglais, on parle de bière « hazy ») semble à la mode, il n’en est pas moins important de savoir maîtriser son process pour faire une bière claire. Le trouble provient de particules en suspension dans la bière. Celles-ci peuvent notamment provenir de résidus de levure, de protéines, de polyphénols (les tanins) ou encore de résidus de houblon et autres ingrédients utilisés lors du brassage ou de la fermentation. Nous ne parlerons pas des potentiels troubles apportés par des bactéries ou autres infections. On distingue deux types de trouble :

  • Le trouble à froid, il apparaît souvent dans les bières servies trop froides mais il est normalement réversible et disparaît quand la bière se réchauffe.
  • Le trouble permanent, il est présent peu importe la température de la bière. C’est plutôt celui-ci qui va nous intéresser par la suite.

Le trouble lié aux protéines et aux polyphénols (les tanins)

Les protéines proviennent du malt et des éventuelles céréales crues utilisées lors du brassage. Les tanins sont issus de l’enveloppe des grains et des éventuels débris de pailles ainsi que du houblon. Le trouble à froid a lieu lorsque les polyphénols interagissent avec les protéines créant une liaison hydrogénée qui rend alors cette particule visible à basse température. Pour limiter ceci utiliser du malt et des céréales peu élevés en protéines et quand c’est possible choisir des versions de malts sans écorce. Attention le blé et l’avoine contiennent plus de protéines que l’orge à deux rangs. Attention à utiliser des malts de bonne qualité, bien transformés et stockés dans de bonnes conditions. Ceci étant dit ne pas oublier que ce sont les protéines qui aident à donner du corps et de la mousse à la bière, elles sont donc néanmoins utiles en proportions raisonnables. Le houblon apporte environ un tiers des polyphénols dans une bière avec un houblonnage classique. C’est donc pour cela que les bières houblonnées sont souvent un peu plus troubles car le taux de polyphénols devient alors plus important.

Le trouble lié à la levure

La levure flocule (sédimente) à la fin de son cycle de fermentation, mais il demeure toujours une petite partie en suspension ce qui peut poser des soucis de trouble dans la bière jeune surtout si celle-ci a été soutirée avant l’embouteillage. Pour améliorer la clarification, il est possible de sélectionner des souches qui ont des capacités plus importantes de floculation, ce taux est en général indiqué par les fabricants de levures. Il est également conseillé de réaliser une garde à froid (lagering) pendant quelques semaines ou bien encore un passage à froid plus rapide quelques jours avant l’embouteillage (cold crash) pour accélérer la sédimentation des levures en suspension.

Voici quelques conseils pour obtenir une bière limpide :

  • Réaliser un palier protéinique (facultatif) : porter la maische à une température entre 45 et 55°C. Dans ces températures, les protéines complexes et non solubles du malt se transforment en acides aminés. Ce palier dure entre 10 et 20 minutes et a une vraie utilité avec des malts peu transformés ou des céréales crues, il peut être nuisible avec l'utilisation de malts bien transformés. Il permet ainsi de transformer les protéines responsables du trouble la bière mais peut également nuire à la bonne tenue de la mousse. La qualité actuelle du malt étant bonne, c'est donc un palier à effectuer ou non selon les profils de bières ou bien si l'on constate un trouble anormal.

  • Corriger l’eau de brassage et de rinçage (avancé, voir rubrique sur la chimie de l’eau) afin d’obtenir le bon pH lors du brassage et ensuite lors du rinçage des drèches et éviter d’extraire les tanins et protéines par un pH trop élevé.

  • Recirculer correctement le moût trouble lors de la filtration et ce jusqu’à obtenir un moût déjà bien limpide. Attention la technique du BIAB a ses limites et ne permet pas toujours d’obtenir un moût limpide, je recommande plutôt l’utilisation d’une cuve filtre.

  • Réaliser une ébullition longue, franche et vigoureuse. On doit voir se former des paillettes en suspension dans le moût, les albumines, appelées aussi cassure à chaud, ce sont des protéines qui coagulent. On retrouve également des traces sur les bords de la marmite, ainsi que de la mousse en début d’ébullition. Il est bien sur possible d’écumer tout cela.

  • Utiliser un agent clarifiant dans les 10-15 dernières minutes d’ébullition comme l’irish moss ou dérivé (protafloc, whirlfloc, supermoss…) basés sur la carraghénane qui permet d’améliorer la coagulation des protéines, tanins et des particules de houblon.

  • Le refroidissement rapide du moût va également permettre la cassure à froid en faisant coaguler les protéines, les polyphénols et tous les résidus en suspension dans le moût. Ceci associé à la technique du whirpool (effectuer un mouvement centrifuge dans la marmite pendant le refroidissement) permet de séparer ensuite plus facilement le moût vers la cuve de fermentation des résidus situés au milieu du fond de cuve ébullition.

  • En fin de fermentation il est intéressant de réaliser un lagering de la bière, c’est à dire de placer le fermenteur dans des conditions de température très fraîches (entre 10 et 2°C) pendant environ 2 semaines afin de finir la fermentation, d’affiner le goût de la bière et dans notre cas de favoriser la sédimentation de la levure et donc la clarification de la bière.

  • Une alternative un peu plus rapide s’appelle le « cold crash » (passage à froid) et consiste à descendre rapidement la bière à température extrêmement froide (1-5°C) pour obtenir une clarification de la bière pendant 2 à 3 jours. Cette technique permet de faire sédimenter la levure et les résidus de houblon après un dry hopping par exemple.

  • Transfert avant l’embouteillage, cela va de soi il ne faut pas re-mélanger la partie liquide et la partie solide au moment du sucrage et de l’embouteillage. Il est donc préférable de soutirer la bière (sans aspirer trop de fond de cuve) dans un autre récipient avant d’effectuer cette opération. Et pas de soucis il y aura assez de levure pour la refermentation en bouteilles.

  • Autres agents de clarification. Il existe d’autres moyens de clarifier une bière après fermentation. Par ajout de gélatine (2 feuilles pour 20L à diluer dans de l’eau bouillante et à ajouter à la bière). Colle à poisson (isinglass), bentonite,… si possible évitez très souvent une bonne garde à froid sera le plus efficace !

Pour aller plus loin : https://www.brassageamateur.com/wiki/index.php/Trouble


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